Un homme marche
De tous les groupes qu'a engendré le public rennais, s'il en est un qui mérite son instant de gloire, face à ses confrères autochtones qui s'adonnent à la variété, c'est bien MARC SEBERG.
Qu'on ne nous renvoie pas une fois encore dans les oreilles un « Dantzig Twist » et le nom d'un Marquis en vogue ces derniers temps, le temps a passé et débranché quelques amplis, Pour un inconditionnel du groupe aller à Rennes sans approcher Philippe Pascal et les siens, c'était voir Rita sans Mitsouko (Ouf !),Venise sans mourir !!! Trêve de plaisanteries, toujours tenant le haut du pavé, Sur la Même Longueur d'ondes s'est retrouvé avec Anzia et Bernard de Local Passion (voir article sur Transmusicales) dans un de ces troquets qui font la gloire de la Bretagne. Le maxi 45 T venait de sortir et en attendant le 33 « Le bout des nerfs », un moment de bleu...
Comment se porte Marc Seberg ? On ne le voit pratiquement pas apparaître dans les médias ou en concerts...
« Très bien. Si tu veux, ce qui s'est passé, c'est que nous sommes assez lents entre les disques, il faut le reconnaître. Et là, depuis un an et demi, s'il ne s'est rien passé au niveau média, c'est que nous avons travaillé sur l'album que nous avons enregistré cet été au Rack Studio en Angleterre. Le maxi vient de sortir depuis lundi, l'album sort sous peu, normalement, nous ferons beaucoup de concerts. Hier, j'étais à Paris avec le groupe, nous avons terminé un clip, qui est le premier que nous faisons, avec un réalisateur américain qui s'appelle Mac Merwin, il a fait deux vidéos pour Tracy Chapman, celle de U2 «With or Without you", Peter Gabriel, Sting mals aussi Peter Murphy l'ancien chanteur de Bauhaus. »
Pour votre premier clip, vous sentez-vous satisfaits ?
« Merwin est vraiment une pointure tout en étant un mec hyper simple. Quand tu le vois, tu n'as pas l'impression que c'est un grand, il est en dehors et en plus, il ne fait pas du tout dans la mode, ça ne l'intéresse pas. Il y avait juste une caméra, pas d'éclairage, pas de maquillage, tout en extérieur donc quelque chose de très léger, très simple. Je pense que ça va être très bien. C'est sur « Quelque chose, noir ». »
Après « Le chant des terres » et « Lumières et trahisons », « Le bout des nerfs » semble être autre chose encore...
« C'est un peu le but du jeu pour un groupe de progresser. Si c'est pour faire la même chose, ce n'est pas la peine ! Comme nous laissons beaucoup de temps entre les disques, nous avons le temps de mûrir les chansons, d'intégrer des trucs nouveaux. En gros, nous avons beaucoup travaillé sur les rythmes, beaucoup plus qu'avant. C'est un peu la coloration de l'album. Evidemment il n'y a pas que cela dedans, mais c'est un peu l'idée de base. J'ai l'impression que l'on a besoin de se dire : « Ce n'est pas facile de démarrer comme ça.» En général, nous nous donnons une petite direction, et même si nous ne la respectons pas, le point de départ est là. »
Quelles sont les musiques que tu écoutes et qui influent dans le son de Marc Seberg ?
« Je marche par périodes, et mes périodes en ce moment c'est plutôt blues et début rock, car j'écoute beauoup du Mississipi John Hurt, du blues des années 30, Johnson... C'est comme ça que nous avons commencé avec Philippe. C'était un deal, moi je lui faisais écouter le Velvet Underground et lui me prêtait des disques de Johnson. C'était il y a quinze ans. Ça fait longtemps que je n'avais pas réécouté du blues comme ça, vraiment primitif si on peut dire. J'écoute les premiers Jeff Beck, Clapton, Cream, des trucs comme ça. A part ça, j'écoute aussi beaucoup de classique : Goldberg presque tous les jours. Je suis très baroque en musique classique. »
Le blues ce n'est pas précisément la veine de Marc Seberg...
« Jusqu'à présent, j'ai tout fait pour qu'il n'y ait rien qui rappelle les sons blues américains. Ça va peut-étre changer maintenant. Autremment, pour ce qui est de l'influence dans le son de Marc Seberg, c'est une question de travail. Lorsque j'ai débuté à la guitare, inconsciemment, je pense que c'était pour affinner une certaine personnalité. J'ai toujours joué du blues et j'essayais justement qu'il n'y ait rien de tout ça dans la musique : que ce soit moi ou un musicien au niveau du groupe, quand c'est Marc Seberg nous expulsons un certain nombre de choses. Maintenant, je pense que c'est en train de changer. Je me sens assez fort musicalement et techniquement pour commencer à introduire autre chose et je pense que Marc Seberg est assez stable en tant que groupe, pour affirmer une personnalité et intégrer des influences sans qu'on vous dise : « Ah, c'est bien ça, vous sonnez comme Truc... ». »
Nous sommes à Rennes. La ville de Rennes dans la vie de Marc Seberg ?
« Je ne suis pas né à Rennes mais depuis assez longtemps maintenant, j'y habite, en fait à partir du moment où j'ai terminé le lycée. On est tous resté là. On a trouvé des conditions qu'on ne doit pas trouver dans toutes les villes, à savoir que maintenant sur Rennes, il y a une infrastructure importante pour tout ce qui conceme le rock, il y a Rock Affaire ; c'est une ville qui travaille pour le rock. il y a des circuits, des structures. »
Que penses-tu de la situation des nombreux groupes en France ?
« Il faut que tous les gens en France au niveau des groupes en particulier et au niveau du métier en général, aient une attitude professionnelle. Ce qui n'était pas le cas avant. Je pense honnêtement que depuis trois / quatre ans c'est en train de changer et Rock Affaire en est un signe. Ça ne veut pas dire que tout est bon dans Rock Affaire, mais je pense que pour reprendre une expression célèbre « le bilan est globalement positif. » Si le rock n'est pas encore ce qu'il devrait être en France, c'est parce les groupes ne se sont pas pris la main, et qu'ils n'ont pas traité ça de façon professionnelle. Il y a des gens qui hurlent quand on dit ça, mais quand tu vois comment ça se passe aux Etats-Unis et en Angleterre, tu ne vois plus les choses de la même façon. Jusqu'ici, ça a vraiment été un travail d'amateur, de détente. Il ne faut pas se faire d'illusion, la musique c'est du business. Je sais que c'est un côté pénible, moi-même j'ai horreur de discuter affaire avec d'autres personnes, mais je le fais sinon rien ne se passerait comme on voudrait. Dans une maison de disques, si tu n'essayes pas de contrôler ce qui se passe, il ne faut pas venir te plaindre après si le résultat n'est pas à la hauteur de tes espérances. »
Toi-même, tu as réalisé l'enregistrement d'un groupe qui te tient à coeur, Local Passion...
« Le travail que j'ai essayé de faire avec eux, c'est un peu ça : qu'ils soient un peu responsables, qu'ils se prennent en charge, qu'ils aient une attitude professionnelle au niveau des démarches, du groupe, du choix des titres, des chansons, du studio, du producteur, de tout. C'est un gros boulot. Si tu fais ça à la détente, tu n'arriveras à rien. »
Par contre, aucun d'entre vous ne se charge de la production de Marc Seberg...
« On se refuse à ça. Pour l'instant on a toujours estimé qu'il valait mieux avoir quelqu'un d'extérieur au groupe, avec plus de recul. En fait c'est une richesse supplémentaire, parce qu'il a des idées en plus à apporter. »
Tu perds un peu le sens critique par rapport à ce que tu fais ?
« Beaucoup, tu as besoin d'une oreille qui te remette un peu d'aplomb de temps en temps. Le choix du producteur, c'est déjà un choix de production. C'est-à-dire que tu as des idées bien précises sur ce que tu veux. Maintenant, il a des producteurs qui sont très ouverts, qui ne vont s'occuper que de l'aspect technique et il y en a d'autres qui vont être plus directifs. Mais ça, ça dépend de ce que tu veux. »
...Phil Spector avec les Beatles a sorti le révolver, l'a posé sur la table et a dit : «Là, c'est moi le chef. »
« C'est vrai que Spector ou un mec comme Eno sont des gens qui s'engagent complètement et donnent des directions à la musique. Ce n'est pas un reproche, encore une fois c'est un choix. John Leckie a fait un travail d'organisation parce qu il a apporté des idées, on en discutait tout le temps, mais il a vraiment tout contrôlé. Et puis, le studio c'est vraiment un autre instrument. Ça dépend aussi de la musique que tu fais, mais si tu as une musique genre garage band, tu peux mettre deux micros, tu enregistres et puis terminé. Il se trouve que ce n'est pas tout à fait notre cas, on a donc vraiment utilisé le studio comme un instrument de création. »
Les projets ?
« Nous commençons par la toumée Rock en France qui se termine pour nous à Paris. Ensuite, il y aura des concerts spécifiquement Marc Seberg : d'abord une tournée de mars à mai, dans des petits lieux en France. Ensuite, beaucoup de festivals l'été, en Italie, en Suisse, au Québec... Puis une toumée française avec une quinzaine de dates dans de grandes villes.»
Alain Connangle
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