En 1977, dans toutes les villes de France, de nouveaux groupes apparaissent. Starshooter, Electric Callas, Marie et les Garçons, Ganafoul pour la capitale du rock à Lyon, les Dogs, Olivenstein à Rouen, Little Bob Story depuis déjà un certain temps au Havre ; Strychnine à Bordeaux, Bracos Band sur Toulouse, sans oublier Paris avec Asphalt Jungle, Téléphone, Bijou, Métal Urbain. La Bretagne ne se fait pas oublier non plus et à Rennes une nouvelle formation naît au cours de l'été 1977 : Marquis de Sade qui engendrera de nombreux groupes satellites.

Pierre Thomas passes ses journées à jouer de la batterie, mais les répétitions en solitaire ne lui suffisent plus. Son grand plaisir serait de monter un groupe. Qu'à cela ne tienne, il dépose une petite annonce dans le journal de Rennes. Les réponses ne se font pas attendre. Pierre rencontre Frank Darcel (guitariste), un fan de David " Ziggy " Bowie, mais également de Roxy Music et des Rolling Stones. Un deuxième musicien arrive, Christian Dargelos (bassiste) alias Rocky, qui trouve le nom du gang : Marquis de Sade. Nos trois compères sont très influencés par la nouvelle vague anglaise (Stranglers) et américaine (Télévision). Après trois mois de répétition, avec occasionnellement Alain Potier aux claviers, ils jouent en première partie des Damned en octobre 1977. Ce soir-là, Philippe Pascal est présent dans la salle. Marquis de Sade balance quelques compositions personnelles comme " Putain de luxe ", " Eva Braun ", " New York 77 " ou encore " Né pour soulever l'Enfer". Leur set ne laisse pas le public indifférent et les choses ne vont pas en rester là. Tout change très vite. Philippe Pascal, ami depuis peu avec le bassiste-chanteur, Christian Dargelos, est invité à venir prendre le micro. Celui-ci accepte, à une condition, qu'il amène avec lui son bassiste Michel Rouille. En effet, tous les deux font partie de Pentathal Lethally, un autre combo rennais qui comprend Gilles Anzia et Philippe Thierry. Il est difficile de détruire ce que l'on vient de créer ! Pourtant l'affaire se fait rapidement. Alain Pottier (claviers) disparaît du monde de la musique, et Frank Darcel (guitare), Michel Rouille (guitare également), Christian Dargelos (basse), Pierre Thomas (batterie) et Philippe Pascal (chant) jouent pour la première fois ensemble le 5 novembre 1977 à la MJC La Paillette à Rennes en première partie d'un groupe punk rennais, Frakture. Dès les premières chansons, Christian Dargelos est pratiquement évincé de son rôle de second chanteur et Philippe Pascal s'impose d'emblée !
Puis l'occasion est offerte à Marquis de Sade de jouer devant un public plus nombreux à l'INSA de Rennes en ouverture d'une autre formation française, Trans Europ Express, en tournée pendant le mois de janvier 1978. Marquis de Sade se fait remarquer, entre autres, dans sa façon de s'habiller, leurs vêtements sombres leurs apportant un look strict à l'opposé de celui de Starshooter qui éclabousse de couleur à tout va ! De plus, la provocation est au rendez-vous, le groupe se dit sexiste avant tout ! Peu après, en mars 1978, c'est au tour de Michel Rouille d'arrêter la musique, et donc de quitter son ami Philippe Pascal et Marquis de Sade. Mais en même temps c'est l'arrivée de deux copains. Le premier, Hervé Bordier managera dorénavant le groupe à la place de Pascal Rettel, le frère de Gilles Anzia. Le deuxième, Daniel Paboeuf, au saxophone, est un nouveau membre qui joue aussi avec Philippe Herpin dans les Sax Pustuls et les Anches Doo Too Cool (Anches d'où tout coule). Ces derniers sortent même un album, "Nous Deux", chez Celluloïd. C'est donc avec Philippe Pascal (chant), Frank Darcel (guitare), Christian Dargelos (basse), Pierre Thomas (batterie) et Daniel Paboeuf (cuivres), que Hervé Bordier fait enregistrer à Marquis de Sade deux titres " Air Tight Cell" et "Henry" au cinéma Le Studio à Rennes. C'est un ami, Frédéric Renaud qui amène un magnétophone quatre pistes sur lequel Jean-Pierre Boyer tient les manettes. Le résultat est sur nos platines au début de 78. Ce premier 45 tours paraît sur le label Terrapin créé pour l'occasion. Les 1500 exemplaires sont vendus aux premiers fanatiques de Marquis de Sade, entraînant par la suite la rareté de ce simple qui en fait aujourd'hui un bien beau collector. Les photos de la pochette nous font découvrir des visages livides. Frank Darcel et Philippe Pascal avoueront plus tard que pour accentuer leur image raide, ils se mordaient l'intérieur des joues !
Entre-temps, quelques parisiens avertis ont pu juger sur place de la valeur de Marquis de Sade. En effet, le groupe de Philippe Pascal se classe second derrière Acting Out de Paris (hard-boogie), au tremplin du Golf Drouot du vendredi 7 avril 1978. Leur set nous révèle un groupe prestigieux aux allures fort prometteuses pour soi-disant emmener une nouvelle vague en vue, celle de l'after-punk ! Un nouveau changement intervient ensuite dans la formation, Pierre Thomas, batteur depuis la naissance du Marquis, part s'installer à Nantes. Nous retrouverons sa trace plus tard. Il est remplacé par Eric Morinière, batteur d'un autre combo régional : Trash. Mais ce n'est pas fini, en quinze jours de temps, c'est au tour de Christian Dargelos, alias Rocky, bassiste depuis l'origine du groupe également de s'en aller pour de futurs projets. Henri Abega, bassiste de Apartheid Not lui succède aussitôt. Mais la situation de Marquis de Sade reste très précaire. A peine installé au sein du combo fin août 1978, Henri Abega n'y reste que le temps d'entraîner Daniel Paboeuf (saxophone) dans son sillage. Mais le moment le plus délicat découle du schisme entre le reste du groupe : Philippe Pascal, Frank Darcel, Eric Morinière et le manager, Hervé Bordier. Le tout provoque même la séparation officieuse de la formation. Des jours meilleurs reviennent au cours du mois d'octobre 1978, avec la reformation de Marquis de Sade comprenant le précédent trio Pascal-Darcel-Morinière, avec l'arrivée de Serge Papail à la basse et de Philippe Brunel à la guitare.
C'est avec cette formation que se fait l'enregistrement d'une maquette de quatre titres dont la chanson "Die" reste aujourd'hui inédite. C'est un nouveau manager, Thierry Le Huitouze qui les dirige. Pour commencer, Marquis de Sade retrouve le public parisien les 1er, 2 et 3 janvier 1979 dans la nouvelle boite branchée, le Rose Bonbon. En février, le groupe reprend la route des studios d'enregistrements à Brest. Le club des cinq enregistre deux titres : " Conrad Veidt " et " Who Said Why ? " en vue de réaliser leur deuxième 45 tours. Mais ce disque ne verra jamais le jour. La version de " Conrad Veidt " reste encore inédite, car ce n'est pas celle-ci qui sera utilisée sur leur futur album. Mais ce n'est pas fini, il y a du remue-ménage au sein du groupe à la fin du mois de mars. Philippe Brunel monte son propre combo le Philip Brunel Group, et Gilles Anzia, ancien membre de la formation de Philippe Pascal, Pentathal Lethally, réapparaît ici à la guitare. Mais cette arrivée ne se fait pas sans mal, au bout de deux semaines environ, le bassiste Serge Papail quitte le Marquis pour refonder Frakture avec les guitaristes Jacques Duval et Pierre Perrée et le batteur Philippe Rerolle. Ils laisseront d'ailleurs leurs traces sur un 45 tours, " Sans Visage " / " Nagasakind " et sur la compilation " Rock'n'Rennes " avec " Die Sackgase".
Un nouveau venu, Thierry Alexandre, prend donc la place vacante du bassiste. C'est bientôt l'été, et les affaires sérieuses sont au rendez-vous. C'est la rencontre avec Thierry Haupais de Libération qui va tout accélérer avec la signature de Marquis de Sade sur C.B.H. (Philippe Conrath, Jérôme Beth, Thierry Haupais) dont la distribution est assurée par Pathé Marconi. Parallèlement c'est l'avènement des premières Transmusicales de Rennes à la salle de la Cité le 15 juin. Le groupe y présente un set sans bavure. C'est de bonne augure en vue de du premier album. Tout le monde se retrouve au studio DB à Rennes en juillet, avec aux manettes, Jean-Pierre Boyer qui officiait déjà sur leur premier single " Henry". Thierry Haupais produit lui-même le LP "Dantzig Twist " qui sort à la fin des vacances. Dans les exemplaires vendus à l'époque, il y a un encard sur lequel sont imprimées les paroles et les photos des membres du groupe. Le recto de la pochette nous les présente sous un dessin aux traits rectilignes, raides. Au fil des écoutes, on remarque que Marquis de Sade nous offre des chansons aux mélodies torturées par rapport à toute la production du moment, plus conventionnelle. Le groupe ne chante pas forcément non plus les banlieues grises, mais plutôt les ports, les voyages qui nous entraînent vers leur fascination européenne. Les paroles sont souvent chantées en anglais, mais aussi en allemand, c'est nouveau ! Un seul titre " Conrad Veidt " est interprété en français. L'ensemble nous offre un disque surprenant avec un groupe aux allures plutôt froides. Il nous reste à les attendre en concert.
Au détour des notes de la pochette, on remarque que Daniel Paboeuf reprend sa place au saxophone. Il joue aussi un peu partout au sein des groupes rennais, avec Melaine Favennec ; ou James Bond, le premier groupe de Daniel Chenevez, futur Niagara ; ou encore avec Philippe Herpin chez Kan Digor, aux consonances plus jazzy. Mais Daniel Paboeuf fait seulement partie de Marquis de Sade pour les quelques rares concerts dont celui donné en première partie de Téléphone à St-Brieuc. On note aussi sur l'album "Danzig Twist" la présence de Arnold Turboust aux claviers, un ancien copain de Eric " Morgen" Morinière.
En octobre, ça recommence, de nouveau un membre du groupe quitte le navire, cette fois-ci c'est au tour de Gilles Anzia. Le manager Thierry Le Huitouze s'en va également, et c'est définitivement Hervé Bordier qui revient à la barre ! Frédéric Renaud, guitariste, déjà présent lors de l'enregistrement du premier 45 tours pour avoir prêté son magnétophone, après avoir réalisé en solo son simple "Caresses", rejoint Marquis de Sade en vue de la tournée nationale prévue au début de l'année 1980. Philippe Pascal et les siens sont alors invités à jouer en première partie du concert des Stinky Toys que Etienne Daho organise en cette fin d'année 1978 à Rennes. Puis c'est l'heure du tour de France en février-mars 1980, qui passe aussi par Genève en Suisse. Le public découvre enfin le groupe sur scène où l'on remarque particulièrement le chanteur Philippe Pascal grâce à son jeu de scène très robotique. Ses gestes nous font penser à un automate. La formation se compose alors, outre Philippe Pascal, de son fondateur Frank Darcel (guitare), Thierry Alexandre (basse), Eric Morinière (batterie) et du nouveau guitariste Frédéric Renaud. Le groupe est alors remarqué en février 1980 par Actuel qui en fait un objet de promotion au traversde l'interview de Frank Darcel et de la mise en photo, en couverture, des membres du groupe avec leurs mamans ! De son côté, le magazine masculin " Il " leur consacre également un article.
Le dimanche 9 mars, Marquis de Sade crée l'événement dans le cadre du festival Europe Rock 80 organisè par Europe N°1. Pourtant le groupe dira qu'il aurait pu faire nettement mieux, les roads anglais leur ayant saboté le son, et il est murmuré qu'ils sont là, comme pour Extraballe et Les Révillos, pour amuser le public en attandant le prestation de Joe Jackson. Mais Philippe Pascal, impressionnant dans ses gestes, et ses compagnons resteront comme le meilleur souvenir musical de cette soirée. Les concerts continuent et Marquis de Sade est ensuite présent eu Printemps de Bourges, début avril, en ouverture de Starshooter et Bijou. Puis durant le mois de juin, le groupe part en tournée en Italie et en Angleterre avant de revenir dans le sud de la France. C'est un succès, plus de mille personnes, lors de chaque représentation, sont au rendez-vous pour enflammer les salles de concerts. Profitant de cet enthousiasme, leur second 45 tours " Rythmiques " / " White Light, White Heat", est mis en vente en juin. " Rythmiques " est un titre inédit provenant des sessions de l'album, et il apparaît en 33 tours uniquement sur la compilation "Rock Français Des Années 80 ", au milieu de Taxi Girl, Starshooter, Octobre... Pour la face B, le groupe nous offre une reprise de l'une de leurs influences primordiales, le Velvet Underground, avec " White Light, White Heat ". Sur les notes de pochette, on remarque les noms de Philippe Herpin et Daniel Paboeuf, considérés comme des invités permanents. Quant à Arnold Turboust, il assure encore une fois la partie de claviers. Pour les collectionneurs assidus, une petite différence de pochette est à noter au niveau de l'édition portugaise. Durant ce même mois de juin, on apprend le départ du guitariste Frédéric Renaud qui s'en va fonder les Nus avec une ancienne connaissance, Christian Dargelos. Les Nus apparaissent sur la fameuse compilation " Rock'n'Rennes " avec le morceau " Actrice ". Courant 1982, ils graveront l'album " Les Nus ". Ils bénéficient à l'époque d'un maxi promo à la pochette dessinée, qui regroupe " Johnny CoIère ", " Signe Des Temps " et "Joli Tango". Ils feront une tournée en mars 1983 en première partie du Gun Club et disparaîtront aussi vite qu'ils étaient apparus ! Leur seule mini-attraction étant la reprise très ralentie du " Somethin'Else " d'Eddie Cochran. Au cours de l'automne, Frank Darcel, Thierry Alexandre, Eric Morinière, Daniel Paboeuf et Philippe Herpin enregistrent à Paris (Studio Ramsès) et Londres (Air Studio) aux côtés de leur chanteur Philippe Pascal pour travailler sur de nouvelles chansons en vue de leur second album. Eric Le Lann est invité à la trompette ainsi que Mico Nissim qui remplace Arnold Turboust aux claviers. Arnold vient de déménager à Nantes où il rencontre Muriel (futur Niagara) et Pierre Corneau (futur Marc Seberg). Il ne tarde pas à réapparaître au sein d'un groupe, les Private Jokes avec Pierre à la guitare solo, Gilles Retière comme chanteur, ex-leader de Teenage-Lust, et Philippe, l'ex-bassiste d'un autre combe nantais, les Mickeynstein. De cette association, il résulte un titre sur la compilation " Bande De France " avec le morceau " Flux " qui reste inédit ailleurs. Une autre chanson " Nutchenka " apparaît sur l'album " Rock'n'Rennes " où les Private Jokes se retrouvent aux côtés groupes rennais tels que les Nus, Western Electrique et un autre gang nantais, Mickeynstein ! Le summum des Private Jokes est atteint avec la sortie de leur 33 tours " 4 Jours A Bangkok " paru en 1982 qu'ils partagent, sur la face B, avec Gilles Rétière. Puis, plus de nouvelles du groupe jusqu'au retour en solo d'Arnold Turboust, mais c'est une autre histoire.
Revenons à Marquis de Sade avec l'édition le 15 janvier 1981 de " Rue De Siam ", leur deuxième 33 tours. Steve Nye a produit les chansons, on le connait pour s'être auparavant occupé de Roxy Music. Le résultat est là, l'album est splendide. Cette fois-ci, deux titres sont chantés en français. Frank Darcel aurait souhaité un LP plus gai et aux rythmes plus funky avec une nouvelle version de "Henry" revisitée, mais l'album évoquera désormais la " Rue De L'Angoisse " ! Le look de la pochette reste dans le même esprit que celui du premier 33 tours. Le recto est une sorte de peinture et le verso toujours très dépouillé comporte pour seule indication les titres des chansons en bas de couverture. Les paroles apparaissent une fois de plus sur la pochette intérieure du disque. Putain de luxe !Encore une fois EMI Portugal se distingue en éditant l'album.
Parallèlement Frank Darcel travaille avec son ami Etienne Daho en vue d'un 45 tours. Etienne avait été aperçu aux dernières Transmusicales de Rennes, accompagné par l'équipe de Marquis de Sade, sans Philippe Pascal. Puis le groupe reprend les routes de France en mars 1981 en débutant sa tournée non loin de la rue de Siam à Brest, et sans oublier la Suisse qui les attend à chacun de leurs passages. Patrick Gauthier, ex-membre de Magma, avait été pressenti pour compléter la formation durant les concerts, mais il ne fait pas partie du voyage. Profitant de la tournée, Pathé Marconi édite un 45 tours avec " Wanda's Loving Boy " / " Final Fog (Brouillard Définitif) ", aucun des deux titres n'est inédit, dommage ! Mais plus tard, les fanatiques du groupe regretteront de ne pas avoir fait l'acquisition, rien que pour sa troublante pochette avec la photo d'une fille nue aux mains coupées. A cette édition, il faut ajouter la version du même disque, mais estampillée promo, dans une pochette blanche, encore plus difficile à dénicher.
Puis, lors d'une interview pour le magazine Best, les musiciens de Marquis de Sade montent un canular. Parmi les groupes intéressants à Rennes, ils en inventent un nouveau, Marc Seberg, où séviraient Gilles Anzia (ex-Marquis) et Serge Papail (ex.Marquis et ex.Frakture). C'est Gilles qui en a choisi le nom, Seberg en hommage à la défunte actrice Jean Seberg, et Marc, parce que c'est un de ses prénoms favoris ! Un gag prémonitoire ! En effet, en avril, la triste nouvelle fait vite le tour de la France musicale : Marquis de Sade n'existe plus. Le concert d'adieu a lieu dans la boîte rennaise L'Espace, au cours de ce même mois. Frank Darcel, le guitariste, qui rentre d'un voyage à New York a craqué sur le groupe américain Material. Lorsque Marquis de Sade splitte, il emmène avec lui Thierry Alexandre (basse) et Eric Morinière (batterie) pour former Octobre dans lequel il veut insuffler le son et le beat de ce qu'il vient d'entendre de Material. Octobre est un nom de mois qui lui paraît suffisamment simple pour être retenu. De surcroît, les couleurs et le climat de cette saison lui plaisent particulièrement. Frank travaille aussi en même temps sur le premier album d'Etienne Daho prévu pour fin 1981.
Philippe Pascal, de son côté, entraîne, dans les débuts, son ami Daniel Paboeuf, et rejoint Gilles Anzia et Pierre Corneau (encore membre des Private Jokes), et rappelle le premier batteur de Marquis de Sade, Pierre Thomas pour concrétiser ce qui n'était qu'un canular, le nouveau groupe de Rennes : Marc Seberg, sur lequel Juke Box Magazine reviendra en détail dans le cadre d'un autre article dans un prochain numéro.
Daniel Paboeuf ne reste que très peu de temps, puisqu'il retrouve Philippe Herpin au sein des Sax Pustuls en compagnie de Nikol. Ils enregistrent en août 1981 " La Danse Du Marsupilami ", le petit animal de Spirou, qui fait l'objet d'un 45 tours que l'on découvre dans une version vidéo complètement hilarante. Les Sax Pustuls figurent eux aussi sur la compilation " Rock'n'Rennes ", avec " Sidérant ", aux côtés des Nus, Frakture, Ticket, UV Jets, etc. Daniel et Philippe se retrouvent aussi au sein des Anches Doo Too Cool pour le Lp " Sacrée Musique ", accès et excès jazzy folingue ! Mais c'est surtout avec les Sax Pustuls qu'ils se font le plus remarquer avec l'édition de 1982 de l'album " L'Avis Des Animaux ". Les discs-jockeys chanceux se voient remettre un maxi promo avec pochette, où la version combative de " La Danse Du Marsupilami " est un délire de saxophones... " Amour Difficile " est le morceau vedette destiné à la promotion sur ce maxi, et du coup il paraît également en single dans le commerce avec en face B, " Le Vit De L'Animal ".
Après la disparition de Marquis de Sade, mis à part le groupe Marc Seberg, qui signe chez Virgin, c'est bien évidemment Frank Darcel avec Octobre qui fait le plus parler de lui vinyliquement parlant. En effet, Pathé Marconi les prend en charge en vue d'un album. Mais la formation n'est pas encore stable. Gilles Rétière en est le premier chanteur, pas pour longtemps, il est tout simplement viré pour manque de ponctualité aux répétitions. Il est remplacé par le parisien Eric Lanz. Arnold Turboust (ex-Private Jokes, comme Gilles) vient soutenir Frank Darcel en prenant place aux claviers. Octobre est enfin prêt pour l'aventure de leur premier 33 tours. Le quatuor de base, Thierry Alexandre (basse), Frank Darcel (guitare), Eric Lanz (vocaux) et Eric Morinière (batterie), se retrouve en novembre 1981 au studio DB de Rennes pour l'enregistrement de six titres qui constituent le mini LP " Next Year In Asia " publié en février 1982. Outre Arnold qui fait pratiquement partie intégrante du groupe, le fameux trompettiste Eric Le Lann apparaît parmi les invités, de même que Denis Bourhis au piano et Gregori Czerkinsky aux percussions. Estella et Samantha, deux amies, prennent places aux choeurs. Le fait qu'il n'y ait que six chansons, fait de ce mini album un disque plus dense et plus attrayant. Trois titres sont interprétés en anglais et les trois autres en français. Alain Maneval (salut les p'tits loups) choisit d'ailleurs de diffuser comme un fou le très dansant " Acteurs " (extrait en 45 tours), sur Europe 1 dans son émission du samedi après-midi pendant l'été. Malgré tous ces efforts, " Next Year In Asia " n'arrive pas à convaincre le public et Frank Darcel ne s'en soucie pas vraiment (dommage), car il est trop occupé à jongler entre Octobre et la production du morceau d'Etienne Daho " Le Grand Sommeil " qui lui prend plus de temps que prévu.
Puis début 1983, Patrick Vidal, un ex-Garçon de Marie Et Les Garçons de Lyon, succède à Eric Lanz parti voler de ses propres ailes. Celui-ci nous offre quelques mois plus tard " Hey Petit Coeur ", la version française de " Hey Little Girl " du groupe australien Ice House en 45 tours et maxi. La face B s'intitule tout simplement " Prince " (Pathé Marconi 172 7617). Octobre fait ses premiers pas sur scène aux Transmusicales de Rennes en janvier 1983 au même programme que Kas Product, les Rois Fainéants, Play.Boys, Bill Baxter, etc. Mais l'attention de la foule est retenue par Daniel Paboeuf qui vient de réunir quelques musiciens composites autour du nom de groupe Tohu Bohu. On remarque la présence du guitariste Jello, ex-Starshooter, qui fait sa première réapparition depuis la séparation du quatuor. La scène est alors en ébullition, les musiciens d'Octobre et Christian Dargelos (ex-Nus et Marquis de Sade) viennent chanter quelques standards d'Elvis Presley et de David Bowie, juste pour le fun. Tohu gravera en 1985 trois chantons sur un maxi 45 tours produit par Hervé Bordier, l'ex-manager du Marquis. La reprise du générique du film " Il Etait Une Fois Dans L'Ouest " y est interprété d'une façon inattendue. Barclay édite également un simple promo, sans pochette, avec les deux autres chansons " Barbarians" et " Stripty ". Mais Daniel Paboeuf n'arrête pas ses délires musicaux à Tohu Bohu puisqu'il a fondé début 1983 un autre combo : Ubik. Leur album " Surf " est mis sur le marché français et anglais par le label Light RCA au printemps, suivi du simple criard " Kakikouka ". Ubik effectue quelques réapparitions aux détours de trois autres 45 tours " Nada ", " Maria Del Payote et " Opéra " et d'un gig aux Transmusicales de Rennes en janvier 1984 aux côtés de Tohu Bohu venus pour une dernière fois. Peu de Rennais sont à l'affiche au mi1ieu des Italiens Ltfiba, du groupe anglais Cabaret Voltaire, des Belges T.C.Matic du chanteur Arno, et du havrais Marc Minelli présent discrètement mais fort acclamé par ses fans !
Mais revenons à Octobre, car l'actualité du mois d'avril 1983 est bien la sortie de leur nouvel album " Paolino Parc " avec pour premier souci celui d'apporter une perfection certaine à la pochette. L'idée en venant au travers de films du cinéaste italien Bertolucci. Le tout nous offre un disque ensoleillé, plus abouti que leur premier mini LP. Pathé fait l'effort de commercialiser " Masculin Féminin " en 45 tours, couplé avec " Nos Amis d'Europe ". En 1985, " Masculin Féminin " est inclus sur l'album compilation " Rock Français Des Années 8O " au côtés de " Wanda's Loving Boy " de Marquis de Sade, " Machine à Laver " de Starshooter, " Cherchez Le Garçon " de Taxi Girl... Le simple " Masculin " reçoit un bon accueil auprès du public et occasionne une tournée à travers la France au mois de mai. Mais la suite est plutôt noire, puisque plus aucune nouvelle d'Octobre. Ce n'est que lorsque Frank Darcel réapparaît pour produire en février 1984 l'album " La Notte La Notte " d'Etienne Daho que l'on apprend qu'Octobre n'existe plus. Encore un groupe français de plus qui disparaît, cela devient une mauvaise habitude ! Frank et Etienne travaillent alors souvent ensemble, puis leurs chemins se séparent au printemps 1985 après
la production du hit-single " Tombé Pour La France ". Depuis c'est le silence complet.
D'autre part, on voit réapparaître de son côté Daniel Paboeuf en 1986 pour la réalisation du 45 tours " Tchiki Boum " de Niagara avec Etienne Daho dans les choeurs. Aux Transmusicales de Rennes en janvier 1987, Daniel est présent au sein de la résurrection des Anches Doo Too Cool ainsi que de Ubik. Tout dernièrement, il a formé un nouveau combo, " Les Flamingos " avec Sophie D'Atjy et son compagnon de Tohu Bohu, Jello, pour le simple " Tant Pis Pour Toi ", avec en face B " Lady Rachel ". Pendant ce temps, après deux années d'absence publique, Frank Darcel effectue son retour à la production avec le groupe Passé Simple qui grave un semi hit avec " Viens Vers Moi " et plus récemment avec " Deborah ". Il s'occupe également d'un ancien ami rennais, Benjamin Minimum qui enregistre le simple " Gino Et Ginette " / " Vivre En Ville " avec l'aide du Tourangeau Nicolas Cruel qui avait sorti le très rafraissant 45 tours "Annie Clic Clac". Mais le plus important pour Frank Darcel, c'est la formation de son nouveau combo Senso où il retrouve Patrick Vidal, qu'il avait perdu de vue depuis Octobre. Le tout nouveau label Café Wha, distribué par Pathé, leur offre l'occasion d'enregistrer un premier simple. Aussitôt dit, aussitôt fait, " L'Océan " / " Terre Etrangère " est sur nos platines au cours du printemps 1987, en version single mais aussi en maxi, celui-ci étant agrémenté de l'36 de prolongation du titre " L'Océan " (" ... Ne Sera Pas La Fin ") . Aujourd'hui, Senso est toujours bien vivant avec la publication imminente d'un album.
Parallèlement, le nom Marquis de Sade est sur toutes les lèvres des collectionneurs, notamment grâce au livre " 10 Ans De Rock A Rennes " de Christophe Brault, et la réédition des deux albums " Dantzig Twist " et " Rue De Siam " devrait combler tous ceux qui les avaient raté en 1979 et 1981. Nous allons pouvoir réécouter ou découvrir des titres plus fabuleux les uns que les autres comme " Conrad Veidt " (surtout) ou encore " Skin Desease ", " Smiles ", " Cancer And Drugs ", " Final Fog "...
Si l'histoire du Marquis de Sade se termine là, il est bien évident que Juke Box Magazine reviendra sur le groupe de Philippe Pascal, Marc Seberg, dans un futur proche, mais comme il y a tant de disques à rechercher pour toutes ces formations rennaises, il faut tout d'abord vous laisser le temps de respirer afin de les dénicher pour mieux les savourer !

Roger CHAUVEAU

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